France: l'Etat somme EDF de réduire ses rejets nocifs à Ajaccio
vendredi 29 juillet 2005, 13h42
AJACCIO (AFP) - L'Etat a sommé EDF de ramener dans la norme les rejets d'azote de sa vieille centrale thermique d'Ajaccio en un an et demi au lieu des quatre années qui lui restaient, ces émissions étant la principale source d'une pollution persistante dans le golfe d'Ajaccio.
"J'ai pris un arrêté qui oblige EDF à revenir aux normes de pollution de droit commun avant fin 2006", a expliqué vendredi à l'AFP le préfet de Corse, Pierre-René Lemas.
Cet arrêté, daté du 27 juillet, annule les effets d'un précédent arrêté de 2000, qui autorisait la centrale du Vazzio, dans la banlieue d'Ajaccio, à dépasser les seuils de rejet de certains polluants jusqu'en 2010. EDF s'engageait, d'ici là, à coiffer ses sept moteurs de filtres spécifiques. Or, depuis 2000, un seul en a été équipé.
Le dioxyde d'azote (NO2), rejeté par la centrale, combiné à l'ensoleillement, génère de l'ozone, gaz très irritant qui provoque, à une certaine concentration, des pathologies respiratoires, dont l'asthme chez les sujets sensibles, enfants et personnes âgées.
Depuis deux ans, nombre d'associations de riverains et de médecins dénoncent la "pollution tueuse" du Vazzio, l'union régionale des médecins libéraux la soupçonnant même d'être responsable d'une "augmentation de la cancérologie, des bronchiolites des nourrissons et des pathologies des voies respiratoires".
"C'est un peu excessif et j'ai voulu remettre les pendules à l'heure après des débats polémiques qui durent depuis 20 ans", argumente M. Lemas, qui a lancé une étude épidémiologique.
Pour autant, un arrêté qui vient brutalement interrompre une dérogation d'Etat n'est pas une mesure fréquente. Pourquoi maintenant? "Je voulais avoir tous les éléments qui me démontrent qu'il y avait un risque, je les ai", explique le préfet. "J'applique le principe de précaution, car même si nous ne disposons pas encore de relevés fiables, des extrapolations nous font penser que les risques sont potentiellement supérieurs à la moyenne, même si l'on est encore loin des seuils qui mettraient des vies en danger", admet le représentant de l'Etat.
"Sur d'autres polluants, EDF a fourni des efforts depuis 2000 mais, concernant les oxydes d'azote, le calendrier est plus lent et je l'accélère un peu", explique-t-il. "EDF traîne les pieds en Corse pour faire des investissements nécessaires", commente plus abruptement un haut fonctionnaire.
Cet arrêté intervient alors qu'une procédure d'"information du public", premier niveau d'un système d'alerte à la pollution, est en vigueur depuis le 25 juillet, basée sur les seules données météorologiques en l'absence d'équipement fiable en Corse pour réaliser des mesures scientifiques de concentration de polluants.
"Même si on ne dispose pas d'équipements fiables pour le mesurer, le niveau de NO2 est élevé en raison de la météo et, donc, la concentration d'ozone est importante", explique à l'AFP Jean-Christian Maury, ingénieur en chef du génie sanitaire à la Direction des Solidarités, de la Santé et des Familles (DSS) de Corse.
La centrale du Vazzio "produit 86% du NO2 émis dans le golfe, le reste provenant des gaz d'échappement", selon M. Maury. Elle est aussi la centrale la plus polluante de France en oxydes d'azote, selon les associations qui citent le ministère de l'Environnement.
Le Vazzio met en oeuvre un procédé, datant des années 1970, au fioul lourd à très basse teneur en soufre. En France, ce type de centrales n'existe plus qu'à Ajaccio, Lucciana, près de Bastia, et dans les DOM-TOM.
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