Un Israélien s'interroge
"Pour un seul de mes deux yeux", d'Avi MOGRABI, questionne les mythes de l'histoire d'Israël
Il perd son sang-froid, Avi Mograbi, à la fin de son film. Face aux enfants qui font le pied de grue devant la clôture de séparation, il s'emporte contre les soldats de l'armée israélienne, qui refusent de leur ouvrir la grille. De retour de l'école, les enfants attendent de rentrer chez eux. Quand les soldats lui ordonnent de se taire, le réalisateur israélien leur rétorque que ce n'est pas à lui, civil, de recevoir des ordres mais à eux de servir les citoyens de leur pays. "Aujourd'hui, précise Avi Mograbi, les enfants peuvent au moins s'abriter sous un toit construit par les Nations unies".
Un "lavage de cerveau"
Le film rend palpable la tension omniprésente dans les territoires palestiniens occupés, où "tu ne sais jamais ce qui peut arriver", insiste le cinéaste. Fréquemment humiliés par les soldats de Tsahal, hommes, femmes et enfants palestiniens paraissent à bout de nerfs, à l'instar de ce groupe d'hommes, obligés de rester juchés sur une pierre en plein soleil, avec l'interdiction de se retourner.
Dans Pour un seul de mes deux yeux , Avi Mograbi alterne des séquences tournées sur le vif dans les territoires occupés avec des scènes filmées sur des lieux sacrés, en Israël, où touristes et jeunes étudiants sont sensibilisés au b.a.ba de l'histoire sioniste. "Sorte de lavage de cerveau, dénonce Avi Mograbi, qui ne tient pas compte d'autres lectures possibles." C'est ainsi que le suicide collectif des zélotes réfugiés à Massada qui, pour éviter de tomber aux mains des Romains, tuent femmes et enfants avant de se jeter de la falaise, est glorifié par les guides israéliens qui font visiter les vestiges. Or, pour certains historiens comme Flavius Josèphe, rapp elle Avi Mograbi, les zélotes sont des Juifs extrémistes qui n'hésitent pas à voler et à tuer leurs semblables pour arriver à leurs fins.
C'est à la suite de la vague d'attentats suicide, en 2002, que le réalisateur israélien, entendant parler de "la culture de mort dans l'islam", décide d'interroger "ses propres mythes fondateurs". Celui de Samson, enseigné à l'école, idéalise ce "héros" aux yeux crevés qui, acculé par le désespoir, décida de se suicider en provoquant la mort de milliers de Philistins, ses ennemis. Samson, qui invoque Dieu - "que je me venge des Philistins pour un seul de mes deux yeux"-, n'est jamais présenté comme le "tout premier kamikaze de l'histoire", remarque Avi Mograbi. Claire Cousin
'Une rétrospective des films d'Avi Mograbi est prévue à l'Espace Saint-Michel, 7, place Saint-Michel, Paris V e
Metro
"Pour un seul de mes deux yeux", d'Avi MOGRABI, questionne les mythes de l'histoire d'Israël
Il perd son sang-froid, Avi Mograbi, à la fin de son film. Face aux enfants qui font le pied de grue devant la clôture de séparation, il s'emporte contre les soldats de l'armée israélienne, qui refusent de leur ouvrir la grille. De retour de l'école, les enfants attendent de rentrer chez eux. Quand les soldats lui ordonnent de se taire, le réalisateur israélien leur rétorque que ce n'est pas à lui, civil, de recevoir des ordres mais à eux de servir les citoyens de leur pays. "Aujourd'hui, précise Avi Mograbi, les enfants peuvent au moins s'abriter sous un toit construit par les Nations unies".
Un "lavage de cerveau"
Le film rend palpable la tension omniprésente dans les territoires palestiniens occupés, où "tu ne sais jamais ce qui peut arriver", insiste le cinéaste. Fréquemment humiliés par les soldats de Tsahal, hommes, femmes et enfants palestiniens paraissent à bout de nerfs, à l'instar de ce groupe d'hommes, obligés de rester juchés sur une pierre en plein soleil, avec l'interdiction de se retourner.
Dans Pour un seul de mes deux yeux , Avi Mograbi alterne des séquences tournées sur le vif dans les territoires occupés avec des scènes filmées sur des lieux sacrés, en Israël, où touristes et jeunes étudiants sont sensibilisés au b.a.ba de l'histoire sioniste. "Sorte de lavage de cerveau, dénonce Avi Mograbi, qui ne tient pas compte d'autres lectures possibles." C'est ainsi que le suicide collectif des zélotes réfugiés à Massada qui, pour éviter de tomber aux mains des Romains, tuent femmes et enfants avant de se jeter de la falaise, est glorifié par les guides israéliens qui font visiter les vestiges. Or, pour certains historiens comme Flavius Josèphe, rapp elle Avi Mograbi, les zélotes sont des Juifs extrémistes qui n'hésitent pas à voler et à tuer leurs semblables pour arriver à leurs fins.
C'est à la suite de la vague d'attentats suicide, en 2002, que le réalisateur israélien, entendant parler de "la culture de mort dans l'islam", décide d'interroger "ses propres mythes fondateurs". Celui de Samson, enseigné à l'école, idéalise ce "héros" aux yeux crevés qui, acculé par le désespoir, décida de se suicider en provoquant la mort de milliers de Philistins, ses ennemis. Samson, qui invoque Dieu - "que je me venge des Philistins pour un seul de mes deux yeux"-, n'est jamais présenté comme le "tout premier kamikaze de l'histoire", remarque Avi Mograbi. Claire Cousin
'Une rétrospective des films d'Avi Mograbi est prévue à l'Espace Saint-Michel, 7, place Saint-Michel, Paris V e
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